IVG médicamenteuse : est-ce vraiment moins risqué que l’IVG chirurgicale ?
IVG médicamenteuse : une solution banalisée ?
L’avortement médicamenteux est de plus en plus proposé comme alternative principale à l’IVG chirurgicale. De nombreux sites d’information grand public en vantent les avantages, parfois sans alerter sur les risques.
Certains évoquent une méthode réalisable à domicile, ne parlant que des “symptômes” et passant sous silence les “complications potentielles”. En France, les médias restent discrets sur les effets indésirables de l’IVG chimique, malgré des données préoccupantes.
Une surveillance officielle limitée
L’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), responsable de la collecte des effets secondaires liés aux médicaments, dispose de très peu de publications sur la Mifégyne® (RU 486).
Sur plus de 230 000 IVG pratiquées chaque année en France, seules trois publications liées à la mifépristone sont disponibles sur les bases de l’ANSM, contre :
- 46 sur le paracétamol,
- 127 sur les cosmétiques,
- 282 sur la grippe A.
L’ANSM souligne néanmoins la nécessité du respect strict des doses et conditions d’utilisation, rappelant des cas d’infections mortelles en usage hors AMM de misoprostol (Cytotec®).
Une étude finlandaise met à jour des complications plus fréquentes avec le Mifégyne (RU 486)
Une étude menée en Finlande (Obstetrics & Gynecology, 2009) a comparé 42 619 avortements (médicamenteux et chirurgicaux) réalisés jusqu’à 63 jours de grossesse.
Chiffres clés :
- 20 % des femmes ayant subi une IVG médicamenteuse ont eu des complications, contre 5,6 % pour les IVG chirurgicales.
- 15,6 % ont présenté des hémorragies nécessitant une consultation ou hospitalisation.
- 1,7 % ont contracté des infections.
- 6,7 % ont eu des avortements incomplets, avec 5,9 % nécessitant une intervention chirurgicale.
- Environ 0,1 % ont eu des effets indésirables graves : lésions, embolies pulmonaires, troubles psychiatriques, voire décès.
Risques accrus selon l’avancement de la grossesse
L’étude montre que plus la grossesse est avancée, plus les risques augmentent, notamment :
- Hémorragies sévères,
- Infections,
- IVG incomplètes nécessitant une chirurgie.
La FDA américaine, comme la France, recommande l’usage du RU 486 jusqu’à 49 jours d’aménorrhée, mais certains praticiens l’utilisent jusqu’à 63 jours.
Comparaison avec l’IVG chirurgicale
Si l’avortement chirurgical comporte lui aussi des risques, ceux-ci sont globalement moindres selon l’étude :
- Effets indésirables : 5,5 %
- Hémorragies : 2,1 %
- Infections : 1,7 %
- Avortements incomplets : 1,6 %
- Lésions physiques : 20 fois plus fréquentes qu’avec les IVG chimiques
Et les effets à long terme ?
Les complications physiques ou psychologiques telles que la dépression, l’infertilité ou le syndrome post-IVG peuvent apparaître plusieurs mois ou années après l’intervention, échappant aux études à court terme.
Conclusion : une évaluation à approfondir
Le professeur Anthonioz déplore l’absence d’études approfondies en France sur l’IVG médicamenteuse, malgré son large usage. Alors que la mifépristone a été testée en France avant sa diffusion internationale, la recherche locale reste minimaliste.
Un débat médical et éthique est donc nécessaire pour mieux informer les femmes, renforcer le suivi médical, et garantir un choix éclairé entre les deux méthodes d’IVG.
À propos de l’auteur :
Dr Philippe ANTHONIOZ
Ancien professeur d’histologie, d’embryologie et de cytogénétique à la faculté de médecine de Tours. CES de gynécologie. Chef de service honoraire.