Actualité IVG en France
En 2023, 243 623 IVG ont été enregistrées, marquant un record depuis 1990. Quelles sont les données les plus récentes et les évolutions concernant l’IVG ? Comment expliquer cette augmentation du nombre d’IVG en France ?
Les chiffres clés sur l’IVG en France
En 2023, le nombre d’IVG a atteint 243 623, soit une augmentation de 8 600 par rapport à 2022 (234 300 IVG) et de 7 000 par rapport à 2019 (232 000 IVG). Cette hausse, observée après une baisse liée à la pandémie de Covid-19 en 2020 et 2021, reflète un retour à un niveau supérieur à celui d’avant la crise sanitaire.
- 16,2 IVG pour 1000 femmes en âge de procréer en 2022. Entre 2021 et 2022, le taux de recours augmente pour toutes les femmes majeures.
- Profil démographique : Les IVG sont concentrées chez les femmes de 20 à 34 ans, avec un pic chez les 25-29 ans (28,6 IVG pour 1 000 femmes). Le taux de recours diminue chez les plus jeunes (15-17 ans : 5,7 IVG pour 1 000 en 2019, contre 10,5 en 2010).
- 1 IVG pour 3 naissances en 2022, contre 1 pour 4 dans les années 1990, indiquant une augmentation relative du recours à l’IVG.
Évolution des pratiques : l’IVG médicamenteuse domine
L’IVG médicamenteuse, pratiquée jusqu’à 7 semaines de grossesse (9 semaines d’aménorrhée), représente désormais 79 % des IVG en 2023, contre 46 % en 2006. Elle est réalisée :
- Dans 48 % des cas en établissement de santé (hôpital ou clinique).
- Dans 46 % des cas en cabinet libéral.
- Dans 6 % des cas en centres de santé ou centres de santé sexuelle.
L’IVG instrumentale (chirurgicale), possible jusqu’à 14 semaines de grossesse (16 semaines d’aménorrhée), est majoritairement réalisée en établissement de santé, avec 55 % des IVG hospitalières effectuées avant 8 semaines d’aménorrhée.
Au total : 38% des IVG sont pratiquées hors secteur hospitalier.
Des disparités régionales marquées
Le recours à l’IVG varie considérablement selon les régions :
- France métropolitaine : Les taux varient de 11,6 IVG pour 1 000 femmes en Pays de la Loire à 22,6 IVG pour 1 000 en Provence-Alpes-Côte d’Azur en 2022.
- DROM : Les taux sont plus élevés, allant de 21,0 IVG pour 1 000 femmes à Mayotte à 48,7 IVG pour 1 000 en Guyane.
- Île-de-France : Région la plus peuplée, elle enregistre un nombre élevé d’IVG, mais son taux reste inférieur à celui des DROM.
Ces disparités ne sont pas directement liées à la structure d’âge des populations, mais plutôt à des facteurs socio-économiques et d’accès aux soins.
Comment expliquer ces évolutions et l’augmentation récente du nombre d’IVG ?
1. Simplification et facilitation de l’accès à l’IVG
- Depuis mars 2022, le délai légal est passé de 12 à 14 semaines, permettant un recours à l’IVG plus tardif. Mais ce changement n’explique que 1/5e de l’augmentation globale du nombre d’IVG.
- La suppression du délai de réflexion de 7 jours et la possibilité de réaliser l’IVG médicamenteuse à domicile (pilules + téléconsultation) ont été adoptées :
- la gratuité totale (plus de frais à avancer)
- accès facilité via médecins, sages-femmes, en ville ou à domicile
- Ces changements allègent les contraintes, encourageant un recours plus précoce à l’IVG.
2. Baisse de la contraception et manque de prévention
- Le Planning familial alerte sur une baisse des campagnes nationales de contraception depuis une dizaine d’années : manque d’éducation sexuelle et de diffusion d’informations.
- Une part significative d’adolescentes (à 15 ans) n’utilisent ni préservatif, ni pilule.
- Les difficultés d’accès à la contraception (coût, rendez-vous difficiles, déserts médicaux) jouent également un rôle et augmentent les “grossesses non désirées”
3. Facteurs socio‑économiques et démographiques
- Le phénomène de rattrapage post-Covid : la forte baisse des IVG en 2020–2021 (liée à la pandémie et à la chute des conceptions) est suivie d’un retour à la hausse en 2022–2022.
- L’instabilité économique (précarité, incertitudes financières) amène certaines femmes—en particulier dans les tranches 20–39 ans, les plus concernées—à reporter ou interrompre une grossesse.
- Parallèlement, la concentration de l’IVG chez les jeunes âgées de 25 à 29 ans correspond à une période généralement associée à une forte fécondité, d’où un impact démographique notable.
Un recul global de l’usage de la contraception
En France, 90% des femmes en âge de procréer de 18 ans et plus utilisent un moyen de contraception.
Parmi les femmes françaises ayant eu un rapport sexuel en 2023 :
- 26,8% prenaient la pilule. (2010 : 49,5% et 2000 : 56,4%)
- 32,1% utilisaient une méthode de longue durée réversible (DIU, implant) en 2023. (2010 : 23,3% et 2000 : 21,6%).
- 26,1% utilisaient des méthodes barrières et naturelles (préservatif, retrait, diaphragme…) en 2023. (2010 : 18,6% et 2000 : 17,2%)
- 9% des femmes n’utilisaient pas de contraception (contre 4 et 3,5% en 2010 et 2000).
- 5,5% d’entre elles ont choisi la stérilisation
La peur des effets secondaires (prise de poids, baisse de libido, troubles de l’humeur) et un changement des mentalités contribuent à une baisse des ventes de pilules contraceptives.
Contraception : un paradoxe persistant
Selon une étude nationale de 2007, 66 % des femmes utilisaient un moyen de contraception au cours du mois où leur grossesse a débuté. Dont :
- pilule (37 %),
- préservatif (16 %),
- méthodes barrières/naturelles (18 %)
- contraception d’urgence dans 10 % des cas
C’est l’étude la plus récente sur le sujet, mais il n’y a pas de raison de croire que ce chiffre ait beaucoup évolué : environ 2/3 des femmes en France utilisent une forme de contraception au moment de la conception ayant abouti à une IVG.
Les principaux mécanismes à l’origine de la grossesse involontaire sont la mauvaise utilisation (omission de pilule) ou la défaillance mécanique (préservatif).
Ainsi, l’usage de la contraception ne limite que partiellement le nombre d’IVG.
Conclusion
Avec 243 623 IVG en 2023, le recours à l’avortement atteint un niveau record, porté par une hausse chez les 20-34 ans et une prédominance de l’IVG médicamenteuse. Cette hausse s’explique en partie par une baisse de l’utilisation de la contraception par les françaises, un accès simplifié à l’IVG et des contraintes socio-économiques plus fortes.
Sources :
https ://www.drees.solidarites-sante.gouv.fr/sites/default/files/2023-09/ER1281MAJ.pdf
https ://www.ameli.fr/assure/sante/devenir-parent/grossesse/ivg/ivg-delais-france
https ://fr.statista.com/themes/4153/les-francais-et-les-ivg/
https ://fr.statista.com/themes/2750/les-francais-et-la-contraception/#topicOverview