Quels sont les risques psychologiques après une IVG ?
Les risques associés à l’IVG sont souvent méconnus et parfois passés sous silence. Ils sont pourtant réels et peuvent changer radicalement la vie d’une femme. Plusieurs chercheurs, américains notamment, se sont penchés sur le sujet. Petite rétrospective des études.
Après une IVG, le risque de dépression est augmenté de 65%.
- Augmentation significative : Une étude américaine (Cougle et al., 2003) montre une augmentation de 65 % du risque de dépression chez les femmes ayant subi une IVG, indépendamment de l’âge, de l’origine ethnique, de l’éducation, du statut matrimonial, du revenu ou des antécédents psychiatriques.
- Grossesse non désirée : Le risque reste élevé même pour les IVG motivées par une grossesse non désirée. Les femmes ayant interrompu une première grossesse non désirée présentent un taux de dépression significativement plus élevé que celles ayant poursuivi leur grossesse (Reardon & Cougle, 2002).
- Signes précoces : Dès 8 semaines post-IVG, 44 % des femmes signalent des troubles nerveux, 36 % des troubles du sommeil, 31 % des regrets et 11 % nécessitent des psychotropes (Ashton, 1980).
Troubles psychologiques et stress post-traumatique
- Stress post-traumatique (SPT) : Selon une étude comparative États-Unis/Russie (Rue et al., 2004), 65 % des femmes américaines rapportent des troubles post-traumatiques liés à l’IVG, avec 14 % présentant des symptômes caractéristiques de SPT.
- Hospitalisations psychiatriques : Les femmes ayant avorté sont 2 fois plus susceptibles d’être hospitalisées pour des troubles psychiatriques dans les 6 mois suivant l’IVG comparées à celles ayant accouché (Reardon et al., 2003).
- Soins ambulatoires : Une analyse des dossiers Medicaid en Californie (Coleman et al., 2002) indique que les femmes post-IVG nécessitent davantage de soins psychiatriques ambulatoires.
- Sentiments profonds : 60 % des femmes expriment qu’une « partie d’elles-mêmes est morte » après l’IVG (Reardon, 2003).
Anxiété et troubles du sommeil
- Anxiété généralisée : Parmi les femmes sans antécédents d’anxiété, 30 % risquent de développer des troubles anxieux après une IVG, comparées à celles ayant accouché (Cougle et al., 2005).
- Troubles du sommeil : Les femmes post-IVG sont jusqu’à 2 fois plus susceptibles de nécessiter un traitement pour des troubles du sommeil dans les 180 jours suivant l’IVG (Reardon & Coleman, 2006).
Comportements à risque et troubles associés
- Toxicomanie et alcoolisme : Le risque de toxicomanie et d’alcoolisme est multiplié par 5 chez les femmes post-IVG, même sans antécédents (Reardon & Ney, 2000). Pendant les grossesses ultérieures, les femmes ayant avorté sont 5 fois plus susceptibles de consommer des drogues dures, 2 fois plus de l’alcool et 10 fois plus de la marijuana (Coleman et al., 2002).
- Troubles alimentaires : 39 % des femmes rapportent des troubles comme la boulimie ou l’anorexie après une IVG (Burke & Reardon, 2002).
- Comportement suicidaire :
- Le taux de suicide est 6 fois plus élevé chez les femmes post-IVG (Gissler et al., 1996, 2005).
- 30 à 60 % des femmes rapportent des pensées suicidaires, avec 28 % ayant tenté de se suicider et 14 % ayant fait plusieurs tentatives (Reardon, 2002).
- Une augmentation de 154 % du risque de suicide est observée (Reardon et al., 2002).
- Les adolescentes sont particulièrement vulnérables, avec un risque de suicide 6 fois plus élevé dans les 6 mois post-IVG (Garfinkel et al., 1986 ; Gissler et al., 1996).
Impact relationnel et social
- Divorce et relations instables : Les femmes post-IVG sont plus susceptibles de divorcer, de nouer des relations éphémères et de développer une méfiance envers les hommes, des troubles sexuels (30 à 50 % rapportent frigidité, aversion sexuelle ou douleur) et des comportements autodestructeurs (Shepard et al., 1979 ; Speckhard, 1987).
- Précarité et monoparentalité : Les avortements répétés augmentent le risque de précarité et de monoparentalité (Guttmacher Institute, 2002).
- Violence et instabilité : L’abus d’alcool post-IVG est lié à des violences conjugales, des séparations, des accidents ou des pertes d’emploi (Benedict et al., 1985).
Contexte de l’IVG : pressions et manque d’information
- Contrainte : 64 % des femmes rapportent avoir subi des pressions de leur entourage pour avorter (Rue et al., 2004). 2/3 des IVG impliquent une forme de contrainte.
- Manque d’information : 67 % des femmes américaines déclarent ne pas avoir été informées, 84 % n’ont pas reçu de conseils adéquats, et 79 % n’ont pas été informées des alternatives (Rue et al., 2004). 54 % n’étaient pas sûres de leur décision.
- Réactions négatives : Parmi les femmes souffrant post-IVG, 80 % ressentent de la culpabilité, 83 % regrettent leur choix, 79 % se sentent perdues, 62 % éprouvent de la colère et 70 % présentent des signes dépressifs (Reardon, 2002).
Avortements répétés et syndrome d’autopunition
- Récidive : 48 % des femmes ayant avorté avaient déjà subi une IVG, avec une tendance 4 fois plus élevée à répéter l’acte, souvent liée à un comportement autopunitif (Shepard et al., 1979 ; Fischer, 1986).
Syndrome post-abortif et recommandations
- Facteurs de risque : Les pressions de l’entourage, le manque de soutien, une fragilité psychologique et de faibles convictions religieuses augmentent le risque de syndrome post-abortif (Reardon, 2004).
- Prévention : Les 63 études sur le syndrome post-abortif soulignent la nécessité d’une meilleure information sur les risques psychologiques et d’un accompagnement renforcé avant et après l’IVG.
Conclusion
Les études convergent vers une augmentation significative des risques psycho-comportementaux post-IVG, incluant dépression, stress post-traumatique, anxiété, troubles du sommeil, toxicomanie, comportements suicidaires, troubles alimentaires et instabilité relationnelle. Ces risques sont amplifiés par des facteurs comme la contrainte, le manque d’information et les avortements répétés. Une meilleure prévention, via un accompagnement psychologique et une information complète, est cruciale pour réduire l’impact de l’IVG sur la santé mentale des femmes.
Références
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