Samia 18 ans, j’ai découvert que j’étais enceinte

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Je m’appelle Samia et j’ai 18 ans. Ma vie a changé le 20 septembre 2011 quand j’ai découvert que j’étais enceinte.
Aujourd’hui encore, à quelques jours de l’anniversaire de conception de mon bébé, la douleur me fait monter les larmes aux yeux et me tord le cœur.

 

Je m’appelle Samia et j’ai 18 ans. Ma vie a changé le 20 septembre 2011 quand j’ai découvert que j’étais enceinte. J’étais allée avec mon copain pour faire des tests de dépistage étant donné qu’on ne s’était pas protégés. En lisant le formulaire, j’ai coché la case du test de grossesse. Pour moi c’était une blague, drôle, de passer le test de grossesse, étant donné que je n’avais aucun symptôme de grossesse et que je prenais la pilule (très mal mais j’étais sûre que ça n’arrivait qu’aux autres). Rendue dans le bureau de l’infirmière, je fais le test pipi et là 5 à dix minutes plus tard le verdict tombe. Le verdict qui a changé ma vie. Positif. Enceinte. Le père avait 18 ans, ne travaillait pas, n’allait pas régulièrement à l’école et passait son temps à fêter et dormir. J’allais à l’école, je travaillais et j’étais le seul espoir de ma mère qui a tant souffert par la maltraitance psychologique de mon père.

L’infirmière m’a demandé ce que je voulais faire. Je n’ai eu que le mot avorter à la bouche. Pour moi c’était la seule chose possible à faire. Étant de religion musulmane, ma mère aurait été détruite de savoir que j’étais enceinte et que je gardais le bébé. Mon petit bébé. Pour moi, ayant vu ma mère au foyer souffrir toute sa vie de ne pas avoir étudié, je m’étais promis toute petite de ne jamais être dépendante d’un homme, de ne jamais avoir d’enfants sans diplôme. Et mes rêves étaient grands. Je voulais devenir une prestigieuse avocate. Je ne l’ai donc pas dit à ma mère. Ni à mes amies. Je pensais qu’ainsi c’était moins réel. Mon copain lui voulait que je le garde. Sa famille et lui m’appelait à tout bout de champ et me mettait tellement de pression pour que je le garde. Ils me montraient des vidéos dans lesquelles des bébés suppliaient leur mère de ne pas les tuer, ils fêtaient ensemble l’idée de ma grossesse et étaient heureux comme tout à l’idée d’avoir un nouveau membre de leur famille.

Quant à moi, je me suis enfermée dans moi-même. Je ne faisais que pleurer en parlant à mon bébé dans mon ventre en lui demandant de partir parce que maman ne pouvait pas le garder. Mes amies me disaient que je ne pouvais pas tuer ce petit être. Elles me disaient qu’elles ne pourraient plus être mes amies. Mon copain me disait qu’il me détesterait toujours si je tuais notre bébé. Ma mère et mon petit frère s’inquiétaient à me voir toujours enfermée à pleurer dans ma chambre. Deux jours après avoir su que j’étais enceinte, je prenais rendez-vous pour une première consultation pour un avortement. Dans mon cœur, je savais que je n’avais pas la moindre parcelle d’espoir d’une possibilité de garder mon bébé. Je ne faisais qu’espérer et prier que je fasse une fausse couche. Et voilà que le 26 septembre 2011, 6 jours après avoir découvert ma grossesse, je faisais une fausse couche.

J’ai été immensément soulagée sur le coup. Mais la nuit même des remords intenses ont commencé à me ronger. Ceux d’avoir espéré cette fausse couche. Et surtout ceux d’avoir voulu avorter. Car j’allais le faire si je n’avais pas eu cette fausse couche. Je remerciais Dieu de l’avoir enlevé avant que je ne le supprime car j’en serais morte de culpabilité, de souffrance et de dégoût envers moi. Mais la souffrance a commencé et j’ai eu mal plus que jamais dans ma vie. Dans mon cœur, j’avais la douleur d’avoir perdu l’être le plus cher au monde.

J’ai quitté l’école ne pouvant plus me concentrer sur mes cours. J’ai perdu mon job à temps partiel et mon copain m’a quitté à peine deux semaines après la fausse couche, en sachant plus que tout combien j’avais besoin de lui. J’avais l’impression que seul lui pouvait comprendre car il était le père de mon bébé. Mais il est parti. Puis mes amies se sont éloignées, ne se sentant pas capables d’affronter ma souffrance. Puis là, mon calvaire a commencé. Je restais dans ma chambre toute la journée, tous les jours, nulle part où aller, plus rien à faire. Rien que pleurer et souffrir en pensant à mon bébé et à son père qui était parti avec une autre et m’avait laissé un texto en refusant de me parler au téléphone ou de me voir. J’ai vécu le plus long et grand enfer de ma vie.

La vie pour moi était  finie. J’ai pensé a m’enlever la vie, ne voyant que ça pour arrêter de souffrir du départ de mon ex et de l’abandon de mes amis, de la perte de mon emploi, de l’arrêt de l’école, de ma mère à qui je ne pouvais pas me confier et à mon bébé que je voulais rejoindre. J’étais rongée de culpabilité, de douleur, de souffrance, de larmes.

Aujourd’hui encore, à quelques jours de l’anniversaire de conception de mon bébé, la douleur me fait monter les larmes aux yeux et me tord le cœur.

Mais je sais que je suis tellement chanceuse que mon bébé soit « parti tout seul » avant que j’ai eu à avorter. Mon bébé que je pleure encore aujourd’hui, mon premier bébé à qui j’ai donné un nom et que je donnerai tout pour prendre dans mes bras aujourd’hui. Mon bébé que j’aime et que je n’oublierai jamais. Mon bébé à moi.